A quoi ça sert de jouer pour les adultes ?

La souris verte

A quoi ça sert de jouer pour les adultes ?

Le jeu, chez les enfants, est capital pour l’affirmation de soi, car c’est un moyen de structuration de la personnalité, d’apprentissage de la vie, de découverte des autres, de développement des facultés d’imagination, de logique, d’adresse physique. Le plaisir rend facile ce qui est difficile. Mais Qu’en est il alors pour les adultes ?

 

.

.

Nous n’avons pas la prétention de repondre à cette grande question en quelques lignes fugaces alors que certains ont passé leur vie a le faire sans pour autant convaincre tout le monde. Mais, humblement, tâchons de survoler (de haut…) les grandes problématiques de cette question…

Étymologie : En latin, le jeu est désigné par le terme ludi, qui, en français, a donné ludique. Le terme « jeu » vient lui du mot latin jocus signifiant plaisanterie ou badinage.

De la marelle aux machines à sous, des dés au Loto national, des fléchettes aux matchs de football internationaux, des carnavals et charivaris aux jeux de rôles ou des jeux interactifs en réseaux…, dans toutes les sociétés, depuis la nuit des temps, enfants et adultes ont toujours aimé jouer. D’où nous vient ce penchant ou même, parfois, cette passion pour le jeu ? En quoi le jeu est-il facteur d’apprentissages, de réalisation de soi, de sociabilités spécifiques, de formes culturelles nouvelles ?

L’étude du jeu a une longue histoire. De Platon à Kant, de Froebel à Piaget, les philosophes, historiens, biologistes, psychologues et éducateurs ont étudié ce comportement répandu pour comprendre comment et pourquoi nous jouons. Les chercheurs suggèrent que le jeu est un élément primordial de l’apprentissage qui permettra aux enfants d’imiter les comportements adultes, d’exercer leurs capacités motrices et d’en apprendre un maximum sur le monde qui les entoure. Ainsi, de récentes recherches semble confirmer ce que Jean Piaget disait, à savoir que «le jeu est le travail de l’enfance». Mais tous le monde ne va pas en ce sens…si jouer ne servait qu’à apprendre à jouer comme le suggère Gilles Brougère?

Le débat va encore plus loin, car une fois sortie du monde de l’enfance, qu’apporte alors le jeu? Serait-il possible, envisageable, que jouer ne serve à rien ?

 

.

Le jeu et l’adulte

Le jeu semble étendre son territoire hors des magasins de jouets et des chambres d’enfants pour s’introduire dans le monde si sérieux des adultes. La « civilisation des loisirs » – quasi prophétisée par le sociologue Joffre Dumazedier dans les années 60 – serait-elle responsable de cette inéluctable déferlante ? Les « grandes personnes » sombreraient-elles dans une douce régression vers les comportements infantiles normalement réservés à la prime jeunesse ?

citation

Certaine personne parle d’un phénomène d’adulescence. Le terme désigne le prolongement de l’adolescence en dépit de l’entrée dans l’âge adulte. L’adulescence commencerai vers 18 ans et se terminerai en général autour de 30 ans (et parfois bien plus). Un de ses symptôme serait la  procrastination ou l’art de se perdre dans des activités non productives et d’oublier celles qui le sont et qui sont donc prioritaires…

En effet, depuis l’avènement du monde industrialisé, jouer ne rime pas avec « rentabilité », mais avec « oisiveté ». Un état que l’on pardonne bien volontiers aux enfants, mais pas aux adultes. A tel point que, en 1899, le sociologue Thorstein Veblen écrit “La Classe des loisirs”, qui dénonce les divertissements « improductifs » pour la société ! Les jeux de hasard sont – tout juste – tolérés, les profits n’étant pas liés à la sacro-sainte notion de travail.

les-hommes-sont-deternels-enfants-qui-ne-murissent-qua-partir-de-43-ans

L’art de la guerre…

D’après Lenore Terr, l’élément psychologique fondamental est que le jeu permet de s’oublier soi-même. Et seul l’oubli de soi, associé au plaisir permet de se dépasser et d’être créatif. Voilà la grande différence entre les enfants et les grandes personnes : les premiers, en effet, jouent pour se découvrir et se structurer ; les seconds, pour s’oublier et se dépasser. Individuel ou collectif, le jeu, par essence échappe aux normes de la vie sociale ordinaire. Il permet aux adultes de sortir de leur quotidien pour s’immerger momentanément et totalement dans un cadre fabuleux.

Sans titre

 Non seulement jouer permet d’être plus créatif, plus heureux et plus performant, mais empêche aussi… de vieillir ! Ainsi, « chaque personne vieillit selon l’image qu’elle se crée elle-même du vieillissement, explique  Guido Verbrugghe. C’est ce que l’on appelle une “croyance limitante”. Ceux qui restent jeunes sont ceux qui gardent l’aptitude à jouer. Dès que l’on cesse d’avoir du plaisir à jouer, on vieillit… ».
.

 Le jeu, une histoire d’adulte

Gabriel Balbo est psychanalyste, Il nous fait un petit rappel sur l’historique du jeu :

« Courses de chars, compétitions sportives, théâtre chez les Grecs et les Romains, jeux de voix chez les Esquimaux ou cerf-volant chez les Chinois : on oublie trop souvent que, tout au long de l’histoire de l’humanité, jouer a été considéré comme une activité si sérieuse qu’elle était réservée aux adultes ! Avant la fin du XIXe siècle, époque à laquelle l’industrie du jouet commence à se développer, le terme même de “jouet” désignait, en France, les bijoux ou les animaux de compagnie qui servaient à amuser les adultes. Et, aussi loin que l’on remonte, les enfants ont eu très peu de jouets… »

Lien vers un ancien article de la ludo : une brève histoire du jeu.

 

 Jeu : Les 4 fonctions psychologiques

Il existe une telle diversité de jeux que le philosophe Roger Caillois, dans “Les Jeux et les Hommes” , les a classés en quatre catégories. Elles répondent chacune à une fonction dominante :

Agôn, la « compétition » (courses, luttes, billard, football, Jeux de plateau, jeux vidéo, etc.). Ces jeux permettent d’exprimer ses ressources personnelles dans un environnement où tout le monde part à égalité, ce qui n’est pas le cas dans la vie réelle.

Alea, le « hasard » (roulettes, dés, loteries, certains jeux de carte). Les jeux de hasard sont projectifs : ils permettent de rêver, car ils font mettre en scène la possibilité de devenir riche tout en faisant l’économie du travail. Ils obligent également à lâcher prise, puisqu’il faut accepter l’idée de tout perdre sur un simple jet de dés. Enfin, ils abolissent les inégalités sociales, car les chances sont les mêmes pour tous.

Mimicry, le « simulacre » (carnaval, masques, déguisement, jeux de rôle, théâtre, jeux vidéo d’aventure). Paradoxalement, se déguiser et se dépouiller temporairement de sa personnalité pour en adopter une autre permet de libérer sa véritable personnalité.

Ilinx, le « vertige » (manèges de fêtes foraines, ski, voltige, rollers). Ces jeux, dont certains se déroulent en compétitions, provoquent un trouble physiologique, une sorte de transe qui efface la réalité. Associée à une certaine jouissance physique, cette transe permet d’entrer en contact avec d’autres dimensions de sa personnalité.

giphy

Agôn, Ilinx ou Minicry?

Sources :

Qu’est ce qu’un jeu ? (Publication universite Paris 13)
Le jeu en éthologie (ethologie.info)
Pourquoi les hommes jouent-ils ? (Café philo)
Pourquoi les adultes ont besoin de jouer (psychologies.com)